mercredi 15 août 2012

Cordillera Huayhuash trail : 220km en 8 étapes

Il faudra compter 12h d'avion et 8h de bus de nuit pour arriver à Huaraz, capitale de la province Ancash située à 3090m d'altitude, entourée par la cordillère blanche et la cordillère noire. Cette ville a connu 2 grands désastres : une inondation liée à un débordement du lac Palcacocha (qui s'est complètement vidé) en 1941 et un tremblement de terre de 7.8 sur l'échelle de Richter en 1970 qui a provoqué une énorme avalanche partant du versant nord de l'Huascaran, le plus haut pic du Pérou (6768m).
Nous serons 14 à participer à cette belle aventure organisée par Christophe Le Saux avec la collaboration de Marco de l'agence "Aventures Andines" qui s'occupera de toute la logistique (tentes, mules et muletiers et cuisiniers) : Arnaud, Bruno, Pascal, Bernard, Gérard, Francis, Marko, le couple Didier et Isabelle, le couple Christophe et Sandrine, l'organisateur Christophe et nous deux.

Phase d'acclimatation : 3 randonnées.
La première randonnée de 7 km consiste à monter à 3700 au Lodge Way Inn, un très joli refuge pour y passer la nuit.Le chemin est bordé d'eucalyptus et je commence déjà à sentir les effets de l'altitude avec des maux de tête et de rapides essoufflements. Pendant que je me repose, les 2 Christophe, Bruno, Sandrine, Marco (de l'agence) et Alex se lancent dans une partie de volley.

La seconde randonnée de 20km consiste à rejoindre la lac Laguna Churup, à 4500 pour redescendre à Huaraz. Je n'arriverai qu'à 4200m (fatigue, essoufflement, rythme cardiaque trop élevé), où Alex me laisse pour rejoindre le groupe au lac.
Laguna Churup
 Après une nuit à l'Hôtel d'Huaraz, nous prenons un bus qui nous amène à 4800 dans la parc national d'Huascaran où nous découvrons les plantes "Puya Raimondi". Puis nous montons au Pastoruri à 5200.Alex m'accompagne dans cette montée très rocheuse. Là je me sens mieux et réussis cette ascension avec succès. Je ressentirai tout de même un petit mal de tête à la descente à 4800, qui se passera rapidement.


vue sur la huayhash


Le Trail :
Etape 1 Chiquian-Llamac : 25km
Après 3h de bus ralliant Huaraz à Chiquian, nous sommes accueillis par les villageois : le maire présente Christophe Le saux comme un grand et renommé trailer et le remercie d'avoir choisi Chiquian comme ville de départ du trail. Dans son discours nous sentons toute la fierté du village de recevoir des Européens. Puis il nous demande de défiler avec les enfants du village jusqu’au stade et de faire un 400m : un 400m à 3400 ! Je peux vous dire que les jambes deviennent très vite du plomb et que les poumons brûlent.

Après un petit repas à base de Quinoa et un peu de repos, le départ est lancé. Une longue descente pierreuse nous amène au bord d’une rivière puis nous traversons un petit village où un jeune garçon m’annonce que mes compatriotes sont déjà passés. J’arrive à une première bifurcation et j’hésite à droite ou à gauche, je regarde les traces des chaussures au sol, mais il y en a des 2 cotés. Je me souviens que Marco de l’agence "Aventures Andines" nous avait dit à la première bifurcation prendre à droite et à la seconde à gauche. Je décide donc de prendre à droite. Après quelques lacets sur une grande piste en descente, je me fais doubler par Sandrine et Christophe qui se sont trompés, puis par Isabelle et Didier, par Bernard, par Marko. Il commence à faire chaud, puis c’est l’hypoglycémie, m’obligeant à m’asseoir. J’essaie de boire et de manger. Je suis rejointe par Francis qui apprenant  mon état préfère rester avec moi. A la 2nde bifurcation nous prenons à gauche et un panneau nous indique Llamac 9km : nous sommes sur le bon chemin ! Après avoir traversé la rivière je vois Alexandre qui vient à notre rencontre, qui est arrivé 4ième en 2h42 et qui nous montre les petits raccourcis pour éviter les grands lacets de la piste. Nous arrivons enfin à Llamac.

 Après avoir lavé les jambes dans la rivière, bu une bière à la petite épicerie du coin, la nuit tombe avec le froid. Un bon diner avec briefing pour l’étape suivante dans la tente messe puis c’est une nuit de repos. Nous faisons la connaissance d'un chien qui nous suivra tout au long du parcours, en courant avec Arnaud, le 1er.

Etape 2 : Llamac-lac Jahuacocha, 15km avec un col à 4300.
Il me faudra 3h pour monter les 5km avec 1000m de dénivelé et arriver essoufflée avec un mal de tête au col Pampa Llamac à 4300 où un panorama époustouflant m’attend.









Cette montée est très fréquentée par les péruviens, leurs convois de mules et des touristes qui m’encouragent. Puis c’est une descente assez abritée par des arbres où je rencontre encore des Péruviens qui m’arrêtent dans ma course pour me demander qui je suis et d’où je viens. J’arrive enfin au bord du Rio Jahuacocha et m’enfonce dans les marécages, je me dirige donc vers la gauche pour longer la montagne et éviter ces marécages, quand j’aperçois Alex sur ma droite : je l’interpelle et il me montre la direction pour rejoindre le campement situé au bord du lac Jahuacocha.
Bruno, Arnaud et Christophe

Lac Jahuacocha
 Sur cette étape je me suis retrouvée seule au bout de 15 minutes mais jamais en insécurité : mais je suis déçue par mon temps (5h pour 15km) et m’inquiète pour les prochaines étapes qui sont plus longues. Alex a mis 3h pour arriver au lac où Arnaud, Christophe et Bruno se séchaient au soleil.
Alex me soigne les ampoules des pieds : il faut que je laisse les chaussures de trail (dont le nouveau modèle à un chausson trop grand) et que je prenne mes chaussures de route. Avec le froid et l’altitude j’ai peu dormi.











Etape 3 : Lac Jahuacocha –Lac Mitucocha, 25km avec 2 cols 4750 et 4700.
Au départ Alex et moi nous nous souhaitons une bonne journée. Nous longeons par la gauche le lac Jahuacocha puis commençons l’ascension (700mD+) vers le 1er col « Rondoy Punta ». Au fur et à mesure de l’ascension nous découvrons dernière nous un autre lac « le Solteracocha », avec son eau bleu turquoise et le glacier Jirishanca.
Lac Solteracocha

Nous franchissons un premier col " Sambuya Punta (4740)" puis après un faux plat montant le col de Rondoy Punta  (4750).
Rondoy punta (4750)

La descente un peu raide par un chemin très fleuri, nous amène vers des marécages au bord d’un affluent du Rio Llamac. Je suis rattrapée par les mules et j’aperçois au loin Francis sur la grande piste très empruntée par les camions allant à la mine.  Magno me propose de traverser la rivière et  de longer la montagne par la droite pour rejoindre la piste beaucoup plus loin. Arrivée au point de départ de l’ascension (500mD+) du 2nd col « Cacananpunta »,  Magno et son ami me propose de monter sur le cheval. Mais je refuse l’invitation. Et je commence l’ascension seule pendant qu’ils prennent leur collation. Arrivée au col, nous avons une vue impressionnante sur la vallée avec des eaux couleur rouille liée à la forte présence de fer.
 J’aperçois  le long chemin à prendre sur la droite de la rivière. J’arrive enfin au campement situé à Janca (4200), au bord du Rio Janca, déçue par le manque de souffle qui m’a empêchée de courir tout au long de cette étape. Alex a couru en compagnie de Pascal et ont été reçu à l'arrivée toujours par le même trinôme, avec un chien de plus. Ils auront mis 5h20.

 Au briefing Christophe nous donne le classement : toujours Arnaud en tête, suivi de Christophe Le saux, de Bruno et d’Alex, classement qui restera inchangé jusqu’à la fin de cette aventure. Christophe nous parle de la prochaine étape avec ses 40km et ses 3 cols et n’autorise que 6 personnes à la parcourir (Arnaud, Bruno, Alex, Pascal, Sandrine et lui-même) par binôme. Pour les autres il nous propose de faire soit 10km du Lac Mitucocha-lac Carhuacocha soit 25km avec  un aller-retour pour voir les 3 lacs juste avant le 2nd col qui est très technique. Après un bon dîner toujours constitué d’une soupe, d’une viande accompagnée de légumes et féculents, et d’une salade de fruit, je passe une nuit peu reposante souffrant du froid et de l’altitude.

Etape 4 : Lac Mitucocha-lac Carhuacocha, 40km avec 3 cols (4650-4800-4600)
Pour l’étape de 40km Sandrine et Pascal décident de ne pas l’entreprendre, donc seul Arnaud, Bruno, Christophe Le Saux et Alex partent pour ce parcours. Moi me sentant fatiguée, je décide de faire les 10km et de voir après. La montée de 430m au 1er col « Yanapunta» (4650) me paraît longue et très difficile. Je me sens très  fatiguée et le souffle court. Magno m’accompagnera pendant la descente au lac Carhuacocha et me proposera de continuer seule en longeant  le lac par sa droite et de me rattraper avec le cheval.


lac Carhuacocha (4138)
 Enfin de compte j’avance assez vite et Magno me rattrape dans la première partie de la montée du 2nd col. Je monte sur le cheval pour 20 minutes et je rencontre Didier et Isabelle, puis Gérard et Pascal qui apparemment n’ont pas réussi à trouver le chemin. Le cheval ne passant pas, je continue à pied jusqu’au lac Siula (4290) avec Magno et son compagnon. Magno m’explique le chemin pour monter aux premiers lacets vers le col « Siula Punta » pour voir les fameux 3 lacs et me laisse pour aller pêcher avec son ami. Je rencontre Sandrine et christophe qui sont sur le retour et qui me souhaite bon courage. La montée me paraît très abrupte et glissante, mais je m’entête et me retourne sans cesse pour essayer de voir les 3 lacs. Enfin je les aperçois : le lac Quesillococha (4332), le lac Siula (4290) et le lac L.Gangrajanca(4245). Je me repose et prends une collation bien méritée.
lacs Quesillococha, Siula, L.Gangrajanda
 Puis je redescends doucement car le terrain est très glissant. Magno et son compagnon me rejoindront sur les bords du lac Carhuacocha et me mènerons à cheval au campement. Je suis très déçue par mon temps et par le fait que je ne peux toujours pas courir. Cette étape de 25km m’a paru très difficile et longue sûrement à cause de la fatigue.
Alex m'attend. Il a essayé de suivre les 3 premiers pendant 30 minutes puis il a continué le parcours seul, pour arriver au col "Siula" où il a apprécié la belle vue. Dans la descente il a rencontré une Péruvienne avec sa fille, leur a demandé son chemin et offert une barre chocolatée. Puis il a doublé un groupe de randonneurs, près du col "Carnicero" et a terminé sa course en 7h00. Il était déçu de ne pas me voir à l'arrivée et de devoir encore une fois monter la tente.
Etape 5 : Lac Carhuacocha-Lac Viconga, 28km avec 2 cols (4600-4750)
Aujourd’hui je me sens plus en forme. Au départ on longe la rivière Carhuacocha sur sa droite, puis un petit coup de cul, qui me laissera vite seule. Peu avant le 1er col, les mules me rattrapent. Un muletier me propose le cheval mais je refuse. Tout à coup je me rends compte que je saigne du nez.


Lac Huaracocha (4540)








Je décide donc de m’arrêter au bord d’un lac et d’attendre que cela s’arrête. Puis je recommence mon ascension et rattrape les mules et Magno au col « Carnicero (4600)». Dans la descente nous longeons de nombreux lacs pour arriver au campement Huayhuash puis c'est la seconde ascension de 1h30 pour arriver au col « Portachuelo Huayhuash (4780) ».
vue du col Huayhash
lac Viconga 










Dans la descente, j'essaie de courir mais mon cœur s’emballe toujours vite, me contraignant à marcher. Puis j’aperçois le Lac Viconga mais il reste du chemin.


Je passe devant un troupeau de Lamas. Je longe le Lac par sa droite, encore un coup de cul où Magno me double avec son ami et le cheval. Puis je passe une porte et Magno me montre le chemin jusqu’au campement bien camouflé derrière une colline.
Alex, contrairement à moi, était fatigué sur cette étape. Il a été rattrapé par Sandrine et Christophe au col "Carnicero" et a fini l'étape, en leur compagnie, en 5h. Il a apprécié les bains chauds malgré les coups de soleil et a même réussi à boire 2 gorgées de bière.
Je me prends un thé bien chaud, puis vais me baigner dans les sources chaudes (40°C). Pendant que je savoure la chaleur de l’eau, Alex m’attend en doudoune avec la serviette. . Allez ! il faut préparer le sac pour demain, aller au briefing, dîner et enfin se coucher.


Etape 6 : Lac Viconga- Huayllapa : 30km avec 2 cols de 5000.
Le réveil est difficile et les visages commencent à être marqués par la fatigue. Là encore seuls quelques-uns feront un aller et retour au col San Antonio (5000), juste pour voir le paysage. Au départ on remonte la colline pour bifurquer sur la gauche, traverser la plaine venteuse et commencer l’ascension vers le 1er col « Punta Cuyoc (4950) ». Je commence cette ascension avec Francis et Gérard qui paraissent fatigués aujourd’hui. Au fur et à mesure de l’ascension, l’écart entre Francis et moi grandit. Nous passons une zone marécageuse avec des lacs, puis c’est l’arrivée au col très minéral avec le mont Cuyoc.


Punta Cuyoc
col "Punta Cuyoc"(4950)














Magno est là et commence la descente glissante avec moi, pour ensuite me laisser continuer seule pendant qu’il casse la croute. Il me rattrape un peu plus loin dans la descente et Alex de retour du col San Antonio nous double.


vue du col "San Antonio"



Nous traversons une grande plaine marécageuse par endroit, pour ensuite remonter un petit coup de cul et redescendre au village de Huayllapa en longeant le Rio Calinca. Arrivée à la porte du village, 2 jeunes filles me demandent de répondre à un questionnaire anglais pour l’école. Alex viens à ma rencontre et me guide jusqu’au campement très étroit à côté du stade de foot. Il a réussi à courir avec les 3 premiers pendant 45 minutes, il a franchi le col "Punta Cuyoc" seul, a apperçu des Viscaches, petit animal mélange de lapin et marmotte dans la montée au col "San Antonio" où il a retrouvé les 3 premiers. Dans la descente, il s'est retrouvé dans les marécages, puis il m'a doublé et est arrivé à Huayllapa, juste avant les mules, en 6h.

  

Etape 7 : Huayllapa- Lac Jahuacocha, 30km 2cols (4770-4850)

Huayllapa
On commence le départ en marchant pour arriver sur le bon chemin à la sortie du village : c’est une montée très caillouteuse qui laissera place à une succession de faux plats montants et de montées plus franches mais sur un chemin plus terreux. Francis a décidé de profiter du paysage de cette dernière étape et m’accompagnera pratiquement jusqu’au bout.
Francis dans la montée vers le col "Tapush Punta"

 La montée se fait en surblomp d’un affluent du Rio Huaylloma. L’arrivée au 1er col « Tapush Punta (4770) nous paraîtra longue par le faux plat montant de 1,5km. Dans la descente nous longeons le lac Susucocha dans lequel se reflète la montagne « El Diablo ».

Reflet de "El Diablo" dans le lac Susucocha


 Avec Francis nous faisons attention de bien tourner à droite pour se diriger vers le 2nd col « Llaucha Punta (4850) » très minéral dont la montée m’a paru épuisante. Magno nous y attendais avec le cheval. Puis nous sommes redescendus par un chemin très caillouteux, suivis d’un chemin plus roulant et terreux sur lequel j’ai enfin pu courir pour arriver au lac Jahuacocha très heureuse par cette nouvelle sensation. Gérard me fera la bise pour me féliciter de cet exploit.

Francis au col "Llaucha"

martine à l'arrivée

Je me sens légère et en même temps j’ai un petit pincement au cœur car aujourd’hui c’était vraiment la dernière belle étape de cet épopée.
Alex a fait une longue course en solitaire, puis une course avec des mules dans la descente du col "Tapush". Il finira cette étape en 4h45, toujours avec le même comité d'accueil à l'arrivée.
Demain ce sera un 17km en balcon pour rejoindre Llamac, notre destination finale. Au briefing, Christophe nous annonce le parcours un chemin en balcon qui nous fera arriver à un endroit correspondant à la montée de notre 1ère étape : c’est-à-dire que nous aurons une descente très caillouteuse de 4km. Au dîner nous aurons des petites truites pêchées par les muletiers dans le lac : elles furent délicieuses.
Bière à Francis
Etape 8 : Lac Jahuacocha-Llamac 17km
Cette étape fut difficile pour moi car je n’ai pas réussi à courir sur le chemin en balcon, ni dans la descente (3 fois je me suis tordue la cheville). Le parcours était peu plaisant. Enfin arrivée à Llamac, Sandrine m’a souhaité bon anniversaire de mariage. Il est vrai que cette aventure était notre cadeau de mariage (15 ans déjà).
Alex termine 4ième et moi 14ième.

Nous tenons à remercier Christophe Le Saux pour nous avoir permis de découvrir la Huayhuash, les muletiers et les cuisiniers qui nous ont concocté de délicieux petits déjeuners et dîners, Magno pour sa patience et les autres participants pour leurs encouragements et pour les parties de rigolade le soir. Nous formions une petite famille et l’ambiance était très bonne. C’est vraiment une très belle aventure avec des parcours magnifiques mais très éprouvants et qui demande une préparation sérieuse (que je n’ai pu faire par contraintes familiales et professionnelles). 
Moi, Martine, j’ai souffert physiquement et moralement, car je n'arrivais pas à courir. Seuls mon mental et la volonté d’y arriver m’ont permis de finir cette aventure et les paysages m’ont permis de tenir le coup car cela en valait vraiment la peine. Je me sens grandie et plus forte.